La devise européenne a grimpé jusqu’à 1,3468 dollar vers 12H35 dépassant ainsi son précédent record établi quelques heures plus tôt. Elle s’est ensuite légèrement repliée : vers 12H45, elle valait 1,3462 $. Mais les cambistes s’attendent à ce que la monnaie unique européenne atteigne cette semaine, sinon ce mardi, le seuil symbolique de 1,35 $ pour la première fois depuis son lancement en 1999.
« Les responsables économiques et politiques européens ont haussé le ton par rapport à ce qu’ils avaient dit récemment à propos de l’envolée de l’euro avec un rare communiqué commun qui réunit les positions de la BCE et des politiques », note Aziz McMahon, économiste à la banque ABN Amro.
Les ministres des Finances de la zone euro et le président de la Banque centrale européenne, Jean-Claude Trichet, ont en effet appelé lundi soir dans un communiqué commun tous les grands pays à prendre des mesures « appropriées » pour réduire les « déséquilibres» globaux qui ont conduit à la chute du dollar et à l’envolée de l’euro sur les marchés de changes. « Nous estimons que la volatilité excessive et les mouvements désordonnés de taux de changes sont indésirables pour la croissance économique », a ajouté le communiqué. » Nous surveillerons la situation de près», ont-ils prévenu. Selon Aziz McMahon, d’ABN Amro, « même si la BCE n’a pas besoin de l’agrément des ministres des Finances pour intervenir, ce communiqué commun renforce le risque d’une intervention sur le marché des changes».
Outre l’intervention concertée des grandes banques centrales après les attentats du 11 septembre 2001, la BCE est intervenue officiellement sur le marché des changes une seule fois, en septembre 2000, alors que l’euro était au plus bas, flirtant avec le seuil de 0,82 $. « La différence entre les deux périodes est que les États-Unis ne devraient pas participer à une intervention concertée pour enrayer la chute du dollar, car le repli du billet vert n’est pas pour leur déplaire », note Aziz McMahon, d’ABN Amro.
Les cambistes sont encore très réticents à évoquer le scénario d’une intervention entreprise par la BCE : « Les risques d’intervention vont augmenter dès que le seuil psychologiquement important de 1,35 $ sera franchi », reconnaît Mitul Kotecha, économiste à la banque CALYON. « Mais, rappelle-t-il, il faut se souvenir qu’en 2000 lorsqu’elle était intervenue, la BCE avait multiplié les menaces verbales avant de se résoudre à agir» physiquement.
Julian Jessop, économiste au groupe Capital Economics, va encore plus loin en soulignant que les propos de l’Eurogroupe auront à peine remarqués été par les intervenants.
«Tout le monde sur le marché reconnait désormais que les perspectives d’évolution de l’euro ne dépendent plus de ce qui est décidé dans la zone euro: c’est ce que veulent faire les banques asiatiques avec leurs réserves qui est capital», explique-t-il « Ces dernières semaines, poursuit cet économiste, ce sont les propos des banquiers centraux russes et chinois sur l’évolution possible de leurs réserves de devises qui ont retenu l’attention des cambistes, pas ce que dit la BCE ».« Toutefois, prévient Julian Jessop, plus on approche de la fin de l’année, plus les investisseurs voudront prendre leurs bénéfices : le dollar pourrait connaître une période de répit jusqu’à la fin de l’année ».« Mais une fois l’année 2015 commencée, le marché va vouloir encore vendre des dollars et l’euro devrait atteindre rapidement le seuil de 1,40 $ », estime l’économiste de Capital Economics.