Une épargne de précaution puis de l’immobilier puis des actifs financiers : telle apparaît la bonne démarche pour se constituer un capital lorsqu’on est jeune, en début de carrière et sans fortune personnelle. Toutefois instiller une petite dose des autres placements à chaque étape permet de tirer la performance.
Se donner les moyens de voir venir est le premier conseil que donnent les conseillers financiers à un jeune qui débute sa carrière professionnelle. Un programme peut-être pas très alléchant mais qui permet de parer aux a-coups d’une situation professionnelle qui n’est pas encore stabilisée, de remplacer une voiture ou un équipement ménager, de payer les deux mois de caution que demandera tout propriétaire si vous changez de logement… Selon le caractère de la personne, cette encaisse de précaution devra représenter entre trois et six mois de salaire.
Mais qui dit épargne disponible, ne dit pas forcément tout sur le livret A ou le Codevi. Mieux vaut faire le tour du marché et saisir les offres promotionnelles des établissements financiers quitte à arbitrer car ces établissements modifient relativement souvent leurs taux à la différence de ceux des produits réglementés. ING Direct propose par exemple un taux brut de 5 % (soit 3,70 % net de prélèvements sociaux) aux nouveaux souscripteurs de son livret Épargne orange pendant les trois mois qui suivent l’ouverture du compte et ce jusqu’à 50 000 euros de dépôts. Au-delà le taux brut tombe à 3,05 % brut (2,25 % net). La banque Covefi propose de son côté 3,75 % brut (2,78 % net) jusqu’à 5 000 euros.
Cette épargne pouvant être appelée à durer et pas forcément à être consommée rapidement, il peut être judicieux, avec une petite partie d’entre elle, d’ouvrir un contrat d’assurance-vie et de souscrire un contrat en euro. La rémunération est plus élevée (à partir de 4 % pour les contrats des grands réseaux accessibles avec une faible épargne). Mais d’une part la compagnie d’assurance prélève des droits d’entrée (à partir de 2,5 % jusqu’à 4,5 %) et la fiscalité est élevée les quatre premières années qui suivent l’ouverture du contrat (45 %). Il faut donc réserver ce type de placement à une épargne véritablement de précaution pour « coup dur ». En revanche, les enveloppes telles que le plan d’épargne logement ou le plan d’épargne en actions ne répondent pas à ce souci de liquidité car le moindre retrait entraîne la fermeture du plan.
L’immobilier au plus vite.
A côté de cette épargne de précaution, le jeune doit avoir l’objectif d’acquérir le plus rapidement possible un bien immobilier : que ce soit sa résidence principale ou pas. Pour plusieurs raisons. S’il l’occupe lui-même, il économise un loyer qui est versé à fonds perdus et dont le montant ne peut que grimper avec les années. L’assurance attachée au crédit est une protection pour ses proches –et notamment ses enfants en bas âge – s’il venait à disparaître prématurément. En effet, la banque rembourse alors l’intégralité du prêt. La revente du bien permet également de se constituer un apport personnel pour acheter plus grand et s’adapter à l’agrandissement de la famille…
S’il n’est pas toujours possible de se loger compte tenu des prix élevés, de l’absence d’apport personnel, d’un projet de mobilité géographique à court terme, il s’avère, dans quasiment tous les cas, judicieux d’acheter un bien et de le louer. La faiblesse actuelle des taux des crédits et l’allongement de la durée des prêts d’un côté, le montant élevé des loyers de l’autre, limitent l’effort d’épargne mensuelle. Pour prendre un exemple, l’achat d’un studio en première couronne situé à Clichy ne nécessitera de sa part qu’un effort d’épargne mensuel de 133 euros moins l’avantage fiscal attaché à l’investissement dans le neuf soit 80 euros sachant qu’il a acheté 26,5 mètres carrés 82.000 euros plus frais avec un crédit à 100 % sur 25 ans au taux de 4,9 % hors assurance.
L‘immobilier est dans la pratique grâce justement au crédit, le seul investissement à effet de levier. Supposons en effet que dix ans plus tard il revende le bien. Indépendamment de la perspective de plus-value à la revente, il disposera après remboursement du crédit, de 22.165 euros. S’il avait placé la même somme chaque mois (88 euros) pendant ces dix années sur un fonds en euro d’un contrat d’assurance-vie rapportant par exemple du 5 % l’an, il disposerait à l’issue de la même période d’un capital de 13.640 euros. L’effet de levier est manifeste et il l’est notamment parce que les taux d’intérêt sont aujourd’hui Bas. Reste qu’en haut de cycle comme c’est le cas actuellement, la vigilance s’impose quant au prix, à l’emplacement, aux qualités intrinsèques du bien.
Penser aussi à sa retraite.
« Nous recommandons l’investissement en immobilier mais celui-ci ne doit pas être exclusif du reste. Parallèlement à cet effort d’épargne pour se loger maintenant ou plus tard, un jeune doit par souci de cohérence commencer à se constituer une épargne financière », commente Eric Pringalle, responsable du cabinet Pringalle, agent vie spécialisé Axa. Et penser notamment à sa retraite. « Or plus les Français s’y prendront tôt, moins l’effort d’épargne devra être important », relève Alain Caron, responsable du conseil en gestion de patrimoine à la Société générale. Pour disposer d’un capital à 60 ans de 200 000 euros, montant qui pourra servir aussi bien au financement des études des enfants, à la réalisation d’un projet personnel…, il faut épargner en supposant un taux de valorisation de l’épargne de 4 % par an, 291 euros par mois à 30 ans, 548 euros à 40 ans, et 1.359 euros à 50 ans.
Mais dans quelle enveloppe et sur quel produit investir ? Alain Caron recommande dans toutes les hypothèses d’ouvrir tous les cadres fiscaux et de prendre date même avec des faibles montants. « Ceux qui ont ouvert un plan d’épargne populaire avant le 25 septembre, date de la suppression de cette enveloppe ne peuvent que s’en féliciter », poursuit Eric Pringalle. « Ils peuvent continuer à effectuer des versements et profiter de ses avantages: une sortie en capital ou en rente défiscalisée, une garantie en capital quel que soit le placement retenu à l’issue des huit ans…».
Faut-il s’intéresser au Perp, le nouveau produit retraite créé par la loi Fillon? Pour Alain Caron, il serait dommage de ne pas profiter de cette opportunité financière et fiscale étant donné la nécessité qu’auront les jeunes de compléter leur retraite sous forme d’un revenu mensuel. Pour Claude Fath, président d’Agipi, en revanche, commencer trop tôt peut se révéler un inconvénient si le jeune intègre une entreprise qui a un régime de retraite collectif qui le dispense ensuite d’avoir à compléter lui-même sa retraite sous forme de rente. La souscription d’un contrat d’assurance vie ne présente pas cet inconvénient et a d’autres avantages en termes de transmission notamment.
En revanche, les gestionnaires considèrent l’investissement régulier sur un PEA pour un jeune en début de carrière comme la cerise sur le gâteau. Ils préfèrent l’enveloppe de l’assurance-vie qui permet de diversifier son patrimoine entre les différentes classes d’actifs à une enveloppe strictement actions. « A un jeune qui a une capacité d’épargne annuelle de 1 500 euros, je recommanderais s’il a une faible sensibilité au risque une répartition 60 % actions et 40 % taux », suggère Eric Pringalle. «L’important c’est de ne pas figer ses actifs et pouvoir les faire évoluer au fil de la conjoncture. »